jeudi 6 mars 2014

Gonaïves, à travers l’histoire, racontée par un ancien de la ville

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Cathedrale des Gonaives
« Le grand défilé carnavalesque, qui se déroulera ce dimanche 2, lundi 3 et mardi 4 mars 2014, à la cité de l’indépendance ne sera pas une grande première. Gonaïves a déjà été le bastion du carnaval, dans le temps », se souvient Phèdre Démezier, aujourd’hui âgé de 83 ans.

Les anciens présidents Sténio Joseph Vincent (18 novembre 1930 - 15 mai 1941 ; né en 1874, Vincent mourut en 1959) et Léon Dumarsais Estimé (16 août 1946 – 10 mai 1950 ; né le 21 avril 1900 à Verrettes, Estimé mourut le 20 juillet 1953 à New York) avaient l’habitude d’assister au carnaval, organisé aux Gonaives avec seulement les deux bandes de la ville, Aimable et Sainte Rose, qui créaient l’animation.

Les gens venaient de partout en Haïti et même de l’étranger pour danser ce carnaval, qui attirait la grande foule pour ses couleurs et déguisements, raconte, à l’agence en ligne AlterPresse, Phèdre Démezier. ancien vénérable de la loge de francs-maçons « La sympathie des cœurs No. 29, Orient des Gonaïves ».

Le carnaval d’autrefois avait de retombées économiques pour la ville. Les magnifiques chars allégoriques et les costumes - pour habiller les rois et reines de cette époque - étaient l’œuvre des artisans des Gonaïves.

« Le carnaval, qui est délocalisé, en 2014, aux Gonaïves, me semble un carnaval importé, qui ne sera pas rentable pour la ville », anticipe Démezier, arguant que les chars allégoriques - pour le défilé des trois jours gras de début mars - ont été construits à Port-au-Prince.

Retour sur le 1er janvier 1804

Gonaïves est la ville, où fut proclamée l’indépendance d’Haïti le 1er janvier 1804. C’est pourquoi la ville est surnommée aujourd’hui « cité de l’indépendance ».

Lors de la proclamation de l’indépendance, Jean-Jacques Dessalines s’entoura d’un cortège de généraux de l’armée indigène et d’une foule immense en liesse.

La cérémonie solennelle de la proclamation de l’indépendance se déroula sur la place d’armes des Gonaïves, autour de l’hôtel de la patrie.

C’est à cette occasion que Boisrond Tonnerre prononça les paroles célèbres suivantes : « Pour rédiger l’acte de l’indépendance, il nous faut la peau d’un blanc pour parchemin, son sang pour encre, son crane pour écritoire et une baïonnette pour plume », rappelle Démezier.

Pour mémoire et pour l’histoire, la ville renferme aujourd’hui le mémorial de l’indépendance, érigé à l’angle des rues Liberté et Toussaint Louverture.

Le vert et le jaune, symboles du riz dans l’Artibonite

La cité de l’indépendance a aussi un drapeau. Il est composé de deux bandes horizontales, le jaune en haut et le vert en bas. Au milieu, y est placée une bande blanche verticale, sur laquelle est dessinée l’image d’un lambi, fait remarquer l’ancien vénérable franc-maçon.

Le vert et le jaune représentent, respectivement, les couleurs du riz dans les rizières et du riz qui est mûr, tandis que le blanc symbolise le sel marin dans la zone des Gonaïves, explique Phèdre Démezier.

Quelques repères géographiques et sites historiques

Théâtre de nombreux événements politiques, relatifs notamment à l’indépendance d’Haïti, Gonaïves s’affirme, à travers le temps, comme une ville historique, considère Démezier.

Située a 171 kilomètres au nord de Port-au-Prince, Gonaïves est une ville côtière fondée en 1422 par les tainos qui le baptisèrent Gonaïbo. Elevée au rang de commune en 1738, Gonaives est le chef lieu du département de l’Artibonite.

D’une superficie de 573 mille 58 kilomètres carres, elle a une population de 340 mille habitantes et habitants, selon des estimations de 2012.

La commune des Gonaïves comprend cinq sections communales : Pont Tamarin, Bassin Magnan, Petite rivière de Bayonnais, Poteaux et La Branle.

C’est aux Gonaïves que Toussaint Louverture a été arrêté, le 7 juin 1802, sur l’habitation Georges, avant d’être embarqué sur « le Créole » pour le Cap français, ancien nom de la ville du Cap-Haïtien, puis sur « Le Héros » vers la France.

L’habitation Georges se trouve dans le quartier de Pont-Gaudin, à l’entrée sud des Gonaïves. Un monument, en mémoire de Toussaint L’ouverture, l’un des héros de l’indépendance, y a été récemment installé.

La ville des Gonaïves a plusieurs autres sites historiques, ayant rapport aux batailles ayant conduit à la proclamation de l’indépendance d’Haïti, le 1erjanvier 1804.

La place bouteille, renfermant le mémorial du même nom, est l’endroit où le militaire indigène François Capois, dit « Capois-La-Mort » [1] se serait saoulé pour fêter l’indépendance.

La pierre et la ravine à couleuvres sont deux autres sites historiques, évoquant la lutte des militaires indigènes pour la conquête de l’indépendance nationale.

Située à Lacroix Périsse (section communale de l’Estère, municipalité à 24 km au sud des Gonaïves), la ravine à couleuvres est le lieu, où se déroula l’une des batailles de la révolution haïtienne, par l’armée de Toussaint Louverture, contre les forces françaises esclavagistes commandées par le général Rochambeau.

A deux reprises, le berceau de l’indépendance a été le siège pour rédiger la Constitution des années 1889 et 1950, selon Phèdre Démezier, ancien président de l’hebdomadaire 1804.

Des moments sombres aux Gonaïves

Le 22 avril 1994, pendant le règne militaire ayant suivi le coup d’Etat contre Jean-Bertrand Aristide (le 30 septembre 1991), des forces paramilitaires ont massacré des partisans de cet ancien président à Raboteau, quartier populeux de la ville.

Le 21 septembre 2003, suite à l’assassinat du chef rebelle Amiot Métayer, une rébellion a débuté dans la ville et occasionné le départ du président Jean-Bertrand Aristide le 29 février 2004.

Le 18 septembre 2004, la ville des Gonaïves a connu des heures, parmi les plus sombres de son histoire. La ville a été dévastée par le cyclone Jeanne. Plus de trois milles morts ont été enregistrés et 80% des maisons ont été détruites, à côté d’autres pertes énormes, se souvient Démezier. [em kft apr 02/03/2014 0:40]

[1] Né en 1766 à Port-de-Paix / Nord-Ouest et assassiné en 1806 près de Limonade / Nord, François Capois, dit « Capois-La-Mort » fut un officier de l’armée rebelle d’Haïti, lors de la Révolution haïtienne, et vainqueur de la Bataille de Vertières.


Alter Presse par Exalus Mergenat

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