samedi 28 décembre 2013

La souveraineté ne saurait être invoquée pour justifier des violations de droits humains, selon Trinidad et Tobago

Le gouvernement de Trinidad et Tobago, dont la première ministre exerce la présidence de la communauté économique caribéenne (Caricom), exhorte la République Dominicaine à prendre des mesures immédiates pour restituer la nationalité dominicaine aux centaines de milliers de personnes, rendues apatrides par l’arrêt TC168-13 de la Cour Constitutionnelle dominicaine en date du 23 septembre 2013.


« Pour Trinidad et Tobago, la souveraineté ne devrait pas être invoquée comme une défense pour des violations de droits humains », indique la première ministre Kamla Parsad Bissessar, dans une lettre adressée, le 19 décembre 2013, au président dominicain Danilo Medina et dont a pris connaissance l’agence en ligne AlterPresse.

Le gouvernement de Trinidad et Tobago juge inacceptables l’aspect rétroactif (jusqu’à l’année 1929) de la sentence de la cour constitutionnelle dominicaine ainsi que son impact disproportionné sur les personnes d’ascendance haïtienne en République Dominicaine.

Il s’agit bien d’un processus visant à déchoir de la nationalité dominicaine « les générations de certaines familles, qui détenaient auparavant la nationalité dominicaine et avaient obtenu des documents d’identification nationale et qui avaient exercé leurs droits en divers aspects de la vie en République Dominicaine, comme l’exercice du droit de vote aux élections ».

« N’importe quel engagement à naturaliser ces personnes est en contradiction avec les normes établies et les principes, par lesquels les cadres de naturalisation représentent un moyen pour des ressortissants étrangers d’acquérir une nationalité. Cela n’est pas applicable en l’espèce », souligne la lettre de Parsad Bissessar à Medina.

C’est ce qui explique le qualificatif de « discriminatoire », attribué à ladite sentence du 23 septembre 2013 par un certain nombre d’États, ainsi que des organismes internationaux et des organisations non gouvernementales (Ong).

Ce qui, visiblement, ternit l’image de la République Dominicaine à l’échelle mondiale.

La première ministre de Trinidad et Tobago salue l’annonce de la nomination prochaine, par la République Dominicaine et Haïti, de deux commissions pour traiter des questions de l’immigration et du commerce aussi bien que de la pauvreté et l’environnement, suivant différents reportages en la matière.

Le 20 novembre 2013, Medina a signé le décret 327-13 qui établit les termes des conditions à la légalisation des "étrangers" en situation irrégulière en République Dominicaine.

« Malheureusement, à mon humble avis, ces efforts se situent en deçà de ce qui est nécessaire pour corriger la situation troublante, provoquée au détriment des personnes qui ont été particulièrement touchées par cet arrêt. À cet égard, je voudrais souligner la profonde préoccupation de mon gouvernement face à la situation de ces personnes, qui ont été déchues de leur nationalité et dont le nombre est estimé à plus de 200,000. La violation de leur droit à la personnalité juridique a laissé beaucoup d’entre elles dans un état de vulnérabilité, avec des conséquences graves pour le plein exercice de leurs droits humains. Elle porte atteinte également aux obligations internationales en matière de droits de la personne, obligations librement contractées par l’État dominicain », relève la première ministre trinitéenne Kamla Parsad Bissessar.

En Haïti, de nombreuses voix s’élèvent, à l’exemple du Comité Mémoire 1937 (CM1937), pour « exhorter le gouvernement haïtien à éviter de tomber dans le piège de transformer en un dialogue bilatéral la question d’ordre international », soulevée par la sentence du 23 septembre 2013,. et « de se laisser entraîner à signer des accords, au détriment de la population haïtienne et, en particulier, de ses couches les plus vulnérables, exposées à toutes sortes de tracasseries administratives et d’abus en territoire dominicain ».

« Cette mort civile, infligée, en 2013, à des centaines de milliers de Dominicains d’origine haïtienne, n’est pas sans rappeler le génocide physique, commis, en 1937, sur des dizaines de milliers de migrants haïtiens et leurs familles, ainsi que sur des Dominicains eux-mêmes sur la base de leur phénotype ».

Le Comité Mémoire 1937 s’interroge sur cette pratique de mettre de côté les canaux institutionnels réguliers.

Prenant acte du « plan spécial de naturalisation des étrangers, montrant un enracinement en République Dominicaine », le CM1937 se demande si certains articles, par leur niveau d’exigences difficiles à remplir, n’ouvrent pas la voie à des applications discriminatoires.

Alter Presse

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